The freedom and simple beauty is too good to pass up...

Tessa Lawrence

"TA QUOTE DE FIFOU QUI DÉCHIRE TOUT"

Tu ne te souviens pas exactement comment les choses ont dérapé. Mais tu te souviens de la première claque. C'était pendant une dispute, toute bête, en retour de soirée. Il avait bu, toi aussi et vous vous êtes engueulés. Il a levé la main et avant que tu ne puisses faire un geste, tu as entendu un bruit sourd et sec avant que ta joue ne se mette à bruler. Tu n'as pas pleuré, trop étonnée et surprise, sur le coup. Immédiatement, il t'as regardée, à regardé sa main, et s'est excusé avant de t'embrasser sur ta joue meurtrie. Dix fois. Vingt fois. Il s'en voulais, c'était très clair. Alors tu lui as dit que c'était pas grave, et tu l'as serré dans tes bras. Tu l'as pardonné. Jusqu'au jour où c'est encore arrivé. Deux mois plus tard, environ. Cette fois, la dispute n'était pas aussi violente que la première, mais il a tout de même levé la main sur toi. Puis il a hurlé que cette fois, tu le méritais. Que c'était de ta faute. Et ça l'étais un peu: C'est toi qui avait fait les courses et oublié de lui acheter quelque chose qu'il t'avais pourtant demandé juste avant que tu partes. Alors tu as accepté la claque, parce que tu te sentais responsable.

Ensuite, les coups n'ont pas arrêté de pleuvoir. Toutes les semaines d'abord. Puis, tous les jours. Violemment ou non, suivant ce que tu as fait de mal. Et puis finalement, comme tout était toujours de ta faute, d'après lui, tu as fini par le croire. C'était toi, l'erreur de l'équation. Toi, qui faisait tout de travers. Toi, qui méritais la punition. Il te faisais souffrir, te battait, marquait ta peau, parfois: Mais il veillait à ce que personne ne voit rien. Et toi aussi. Mais peu à peu, il t'as éloignée de tout: De ton lieu de travail, de tes amis, de ta famille. De tes parents, même. Et puis, en un rien de temps, tu t'es retrouvée à sa merci, à New York, là où tu l'as suivi. Ton existence était devenue insipide et floue. Dans l'immense appartement de ton riche petit ami, tu n'étais qu'un fantôme, qu'un meuble qui avait la capacité de se déplacer. Et tous les soirs, tu guettais la venue de ton bourreau: Non pas parce que tu avais hâte, mais parce que tu avais peur. Aucun endroit où te cacher, nulle part ou aller. La maison était propre, le diner était prêt et rien ne clochait...Mais tu savais. Tu savais qu'il trouverai bien quelque chose à te reprocher. Quelque chose qui démangerait sa main, son poing, ou son pied. Peut-être même les trois.

Ce cirque a duré deux ans. Deux années entière. Deux années de ton existence, perdues à jamais, violées et bafouées. Mortes et égrainées. Durant vingt quatre mois, tu as subi sans bronché, tu as accusé les coups, pansé tes blessures et as recommencé le jour suivant. Tu n'étais plus cette fille heureuse de vivre, cette femme qui avait quitté tout ce qu'elle avait toujours connu pour pouvoir filer le parfait amour à New York. Quelle belle connerie. Pourtant, il y a eu un déclic, un jour. Quelque chose, qui t'as soudainement réveillée de ton coma invisible. Le jour où t'as failli mourir. A ce moment là, il te tirait par les cheveux, et tu hurlais en pleurant. Il te faisais mal et tu voulais réellement que ça s'arrête. Mais il continuait, en te traitant de trainée. Tout ça parce que tu avais osé sourire au livreur de pizzas, ce qui n'était pourtant que pure politesse: Et le gamin ne semblait pas avoir plus de dix sept ans, c'était débile. Mais il t'as cognée. Encore et encore. Puis, alors que tu as essayé de lui échapper, il t'as fait trébucher, et t'as poussée. Ton corps lourd et douloureux a dévalé les escaliers et tu t'as affalée sur le sol comme ou poupée de chiffons. Ta tête bourdonnait désagréablement et tu voyais le sang couler depuis le sommet de ton front, jusqu'à tes yeux...Puis ce goût métallique, dans ta bouche...

Tu t'es réveillée une semaine plus tard, à l'hôpital. Il n'était pas là. Parti travailler, lui avait dit l'infirmière. Mais il l'avait veillé toutes les nuits depuis "l'accident." Accident. C'est ce qu'il avait raconté. Qu'elle était trop maladroite et qu'elle avait trébuché sans qu'il ne puisse la rattraper. Là, tu t'es sentie mal. En danger. En réel danger. Alors tu as souri à l'infirmière, et tu as demandé si tu pouvais téléphoner, une fois tes examens terminés. C'est ton père que tu as appelé. Après avoir passé deux ans sans nouvelles et sans en donner, recluse et enfermée. Il avait la même voix et tu as pleuré en l'entendant. Tu lui as simplement dit "Papa, je t'en supplie. J'ai besoin de ton aide." Et une heure plus tard, un homme arrivait. Il était grand, athlétique et extrêmement beau. Il t'as dit être envoyé par ton père. Ils se connaissaient bien, pour être dans la même unité, dans l'armée. Ton père est le plus haut gradé, mais lui vient après. C'est l'un des plus jeunes à avoir obtenu un grade aussi élevé et aussi vite, preuve évidente de son talent et de son dévouement. Il vit à New York, t'as-t-il confié. Et il a pour mission de venir te chercher, et te mettre en sécurité. Au début, tu as refusé. Et l'autre, alors? Il te chercherai. Et il te trouverai. Et il te tuerai. Mais le soldat a juste souri avant de t'aider à t'assoir sur une chaise roulante, malgré ta jambe et ton bras dans le plâtre. Tu n'avais pas confiance en lui, et tu étais effrayée. Mais tu avais confiance en ton père, et il te l'avais envoyé.

A ta plus grande surprise, l'homme ne vivait pas seul. Il y avait dans la maison une jeune femme, qui devait être à peine plus jeune que toi. Sa soeur, d'après ce qu'elle t'as dit en te voyant, pour se présenter. Malgré toi, tu as souris. Voilà longtemps que tu n'avais pas parlé à quelqu'un. Et surtout pas à une fille. Tu t'es attachée à elle et elle s'est attachée à toi. Ce n'est que plus tard que tu as compris que cette fille t'avais aidée à mieux supporter de fait de vivre chez un homme.

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